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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 36e Législature,
Volume 137, Numéro 4

Le mercredi 1er octobre 1997
L'honorable Gildas L. Molgat, Président


LE SÉNAT

Le mercredi 1er octobre 1997

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Le décès d'Alistair Fraser, B.A., LL.B.

Hommages

L'honorable Joyce Fairbairn: Honorables sénateurs, nous rendions hommages, hier, à nos camarades qui sont tombés, à ceux qui ont pris leur retraite et aux nouveaux sénateurs, tous membres de notre famille au Sénat. Aujourd'hui, je voudrais dire quelques mots à la mémoire d'un homme qui fut un membre distingué de notre grande famille parlementaire, l'ancien greffier de la Chambre des communes, M. Alistair Fraser, qui est décédéle 1er septembre à l'âge de 74 ans.

Alistair avait demandé expressément à ne pas avoir de funérailles, si bien que de nombreux hommages qui lui auraient été rendus à cette occasion n'ont pas pu l'être. C'est pourquoi je voudrais évoquer, ici au Sénat, certains souvenirs concernant ce membre de notre grande famille.

Pour beaucoup d'entre nous qui ont fait carrière sur la colline parlementaire, Alistair était l'incarnation de la sagesse, de l'humour et de la gentillesse. Il était pour nous tous, peu importe notre allégeance politique, un symbole d'équité tant dans l'exercice de ses importantes fonctions qu'à l'extérieur. Il fut un mentor et un superbe maître pour ceux d'entre nous qui s'efforçaient de percer les mystères de la procédure parlementaire.

Il a tenté de se faire élire à la Chambre des communes, tout d'abord dans la circonscription d'Esquimalt-Saanich, en Colombie-Britannique, dans les années 50. Il tenta de nouveau sa chance dans les années 60 dans la circonscription de Pictou, située dans sa province d'origine, la Nouvelle-Écosse. Acceptant de bon gré la défaite, il a conseillé beaucoup d'entre nous dans les deux Chambres.

Alistair a été adjoint administratif du légendaire ministre des Pêches, M. Jimmy Sinclair, en 1952; puis auprès du chef de l'opposition, Ross MacDonald, en 1959, et enfin auprès deM. Jack W. Pickersgill, en 1963.

J'ai rencontré Alistair pour la première fois à mon entrée à la tribune de la presse parlementaire en 1962. J'étais alors un profane en matière de procédure parlementaire. Je m'en suis remise à lui constamment jusqu'à ce qu'il prenne sa retraite en 1979. Il s'intéressait énormément aux jeunes qui s'intéressaient énormément au Parlement. C'est ce qui explique la plupart des amitiés vives et durables qu'il liait avec les gens, quel que fut leur âge.

Il est devenu greffier de la Chambre des communes l'année du centenaire, après avoir été greffier adjoint pendant un an. Il a guidé la procédure durant les années orageuses et imprévisibles du gouvernement minoritaire et du premier gouvernement majoritaire de M. Trudeau en 1974.

Ses conseils étaient précieux. Sa patience était extraordinaire. Il a vu à de nombreuses réformes du système après 1968, alors qu'il était au service du Président Lucien Lamoureux et aussi du Président James Jerome. C'est Alistair Fraser qui coordonnait le Programme de stages parlementaires dont on connaît le succès, et on lui demandait constamment son avis lorsque les caméras de télévision ont été introduites aux Communes. Son souci du bien-être des employés était tout à fait naturel et fort apprécié.

Après son départ à la retraite, Alistair a continué de s'intéresser à son endroit favori en devenant coauteur des éditions du Précis de procédure parlementaire de Beauchesne.

Il disait souvent, comme peut-être beaucoup d'entre nous l'avons pensé, qu'il travaillait dans l'un des plus beaux édifices et siégeait dans l'une des salles les plus importantes du Canada. Quand il a eu fini, il a déclaré qu'il quittait là le meilleur emploi au Canada.

Alistair Fraser était vraiment l'une des personnes les plus aimables et les plus dévouées que j'ai rencontrées ces35 dernières années sur la colline du Parlement. C'était un véritable ami et c'est pour moi un honneur de lui rendre hommage ici aujourd'hui.

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, j'ajoute juste un mot aux hommages éloquents du sénateur Fairbairn à l'endroit de notre défunt ami Alistair Fraser. Durant 36 ans, nous avons été amis, même si nous étions des adversaires au sens partisan du terme, unis par notre intérêt commun pour notre Nouvelle-Écosse natale et pour le monde de la politique en général.

Alistair et moi avions une relation plus officielle, à la fin des années 60, quand il était greffier de la Chambre des communes et que j'étais chef de cabinet du chef de l'opposition, M. Stanfield. À cette époque, les partis d'opposition n'avaient pas de budget de recherche. Seul le chef de l'opposition avait un petit budget. Je dois dire que, plus d'une fois, Alistair m'a aidé à étirer le budget du cabinet du chef de l'opposition par différents moyens très créatifs. Je tiens à faire savoir combien j'ai apprécié sa compréhension et son sens constant de l'équité envers l'opposition. C'était un ardent défenseur de la tradition parlementaire et un bon serviteur du Parlement.

(1410)

Comme le sénateur Fairbairn l'a fait remarquer, on a annoncé à son décès qu'il n'y aurait pas de funérailles. C'est typique d'Alistair que d'avoir laissé des instructions pour qu'il n'y ait pas de funérailles, afin de nous empêcher d'y assister pour lui rendre hommage.

Depuis environ un an, je l'ai rencontré à quelques reprises et je n'avais pas la moindre idée de la maladie qui allait lui enlever la vie. Son décès m'a attristé, ainsi que le peu d'attention que les médias ont accordé à sa carrière et au rôle important qu'il a joué dans la vie parlementaire et politique de notre pays. Douglas Fisher a corrigé en grande partie cette négligence en publiant un récit très juste de la vie et de la carrière d'Alistair dans le Ottawa Sun d'aujourd'hui.

[Français]

Le Discours du Trône

Erreur constitutionnelle-Lettre au Gouverneur général

L'honorable Normand Grimard: Honorables sénateurs, j'ai pris connaissance du discours du Trône et j'y ai décelé une erreur constitutionnelle assez grave. Je ne sais pas si mon ami et collègue le sénateur Beaudoin, grand constitutionnaliste devant l'Éternel, a lui aussi pris connaissance de cette hérésie. Je m'explique. Je lis le passage contenu dans le discours du Trône:

Le Parlement du Canada est la seule institution dont les membres sont directement élus par tous les Canadiens.

Je ne sais pas si on a dernièrement modifié laLoi constitutionnelle canadienne. Je sais que l'article 17 de la Constitution stipule que le Parlement contient trois entités bien distinctes: la Reine, le Sénat et la Chambre des Communes.

Lorsque l'on affirme dans le discours du Trône que le Parlement du Canada est la seule institution dont les membres sont directement élus par tous les Canadiens, c'est évidemment une fausseté. Que peut-on penser du sérieux et de la véracité des autres propositions du discours du Trône, si l'on y a commis une grossière erreur constitutionnelle?

Je sais fort bien, honorables sénateurs, que leGouverneur général n'est pas à blâmer d'avoir lu ce texte. Tout le monde sait qu'il a été préparé dans les officines des bureaux du premier ministre. Cependant, je me suis quand même permis d'écrire au Gouverneur général en date de ce jour. Le Gouverneur général, je le connais très bien, c'est un ami et ma lettre est la suivante:

Excellence,

...j'ai pris connaissance du discours du Trône et de l'extrait suivant:

Le Parlement du Canada est la seule institution dont les membres sont directement élus par tous les Canadiens.

Hormis que je ne me trompe, le Parlement du Canada est composé de la Reine, de la Chambre des commune et du Sénat dont les membres ne sont pas élus.

Les sénateurs sont d'ailleurs des parlementaires au même titre que les députés.

Je suis conscient que le discours du Trône n'est pas l'oeuvre du Gouverneur général. C'est la raison pour laquelle je ne vous fais aucun reproche...

Recevez, Excellence, l'expression de mes meilleurs sentiments en même temps que l'assurance de ma plus vive amitié.

Sincèrement,

Normand Grimard

Le Décès de Léon Dion

Hommage

L'honorable Roch Bolduc: Honorables sénateurs, en août dernier, nous avons, perdu un grand Canadien de Québec:Léon Dion.

À la fin des années 40, Léon revenait au Québec après ses études post-universitaires en Allemagne, - poussé à cet endroit par le docteur Munzer - puis en Angleterre. Il initiait les étudiants de la faculté des sciences sociales de l'Université Laval à la pensée politique postscholastique de Machiavel à Harold Laski, son maître à Londres, en passant par Hobbes, Locke, Rousseau, Montesquieu, Hegel, Marx et les autres. Léon décortiquait, avec toutes les nuances requises, les idées des grands maîtres européens pour de jeunes esprits diplômés de nos collèges classiques et avides de savoir la suite de la grande conversation de l'Occident, depuis le 14e siècle jusqu'à notre époque.

Il scruta à la loupe les idéologies, notamment le marxisme, le national-socialisme, objet de sa thèse de doctorat, le libéralisme américain de la naissance du capitalisme corporatif jusqu'à l'État providence.

Durant une décennie, Léon passa ses étés au Weidener Library de l'Université Harvard comme un moine bénédictin, mijotant et préparant ses nombreuses publications qui s'échelonnèrent sur40 ans, et traitant du libéralisme, du statu quo, du fédéralisme canadien, en passant par la sociologie des groupes de pression aux États-Unis et sa grande synthèse sur la société québécoise depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

C'était un éducateur remarquable, très attentif à ses étudiants et très impliqué dans les débats politiques du milieu. On sait, par exemple, qu'il a travaillé avec acharnement aux commissions d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme.

Chez nous, c'était un peu le pendant de Oliver ou Smiley au Canada anglais. À certains égards, c'était aussi notreC.B. MacPherson, mais sous certains autres aspects, il était comme John Meisel et il fut comme le docteur Corry, de Queen's, un grand directeur à la faculté.

Je me rappelle avec beaucoup de nostalgie nos réunions de la faculté des sciences politiques à Laval, au début des années 60, sous sa présidence. Souvent, nous continuions nos discussions chez lui, sous le regard bienveillant de Denise, qui gérait merveilleusement ses activités sociales. Nous avions tous, Jean-Marie Martin, Jean-Charles Bonenfant, Bergeron, Gosselin, Lemieux, Tremblay, Gélinas et moi, le sentiment d'être à l'aube d'une grande aventure intellectuelle.

Merci, Léon, d'en avoir été le capitaine.

Le Discours du Trône

Commentaires concernant l'erreur constitutionnelle

L'honorable Louis J. Robichaud: Honorables sénateurs, je voudrais m'associer au sénateur Grimard pour souligner l'erreur d'un scribe, dans le discours du Trône lu par le Gouverneur général au Sénat la semaine dernière.

C'est un fait acquis que le Parlement du Canada consiste en sa Majesté la Reine, le Sénat et la Chambre des communes, et que des trois institutions, seuls les membres de la Chambre des communes sont élus.

Quelqu'un d'autre aurait dû, avant nous, souligner cette erreur.

Cependant, je me dissocie complètement et vigoureusement d'un extrait du discours du sénateur Grimard à l'effet que cette peccadille est typique de tout le discours du Trône.

Son argumentation a perdu énormément de valeur en associant les deux, en mettant tout dans le même pot. J'ai dit, honorables sénateurs, ce que je pensais.

[Traduction]

Le Manitoba

L'aide accordée durant les inondations du printemps causées par la rivière Rouge

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, je voudrais adresser aujourd'hui des remerciements pour l'aide que le Manitoba a reçue au cours du printemps dernier lorsque nous avons été confrontés aux «inondations du siècle». Comme les honorables sénateurs le savent peut-être, quatre sénateurs ont été touchés par ces inondations et ont éprouvé des problèmes à ce moment-là: l'honorable Président, le sénateur Spivak, le sénateur Jessiman et moi-même. En fait, certains d'entre nous ont quitté Ottawa un peu plus tôt pour porter une attention particulière à ce qui se passait chez nous.

Je voudrais remercier tous les Canadiens de leur appui sur le plan financier et moral, lors de ces inondations. Ils nous ont beaucoup remonté le moral.

Deuxièmement, et je suis persuadé que tous les sénateurs se joindront à moi pour ce faire, je voudrais remercier tous les Manitobains qui ont combattu ces inondations avec enthousiasme et courage. Si vous aviez été là et si vous aviez vu ce qui se passait, vous auriez été très surpris de la force intérieure de ces gens.

(1420)

Troisièmement, je voudrais remercier l'honorable Duff Roblin pour sa clairvoyance, lui qui a tout d'abord compris ce qui s'imposait et qui a ensuite fait construire le canal de dérivation de Winnipeg. Sans ce canal, il y aurait eu dix pieds d'eau au coin de Portage et Main, juste pour vous donner un exemple de l'ampleur de l'inondation.

Enfin, il y avait les Forces armées canadiennes qui occupent une place spéciale dans le coeur des Manitobains. Le travail qu'elles ont accompli durant cette époque a été simplement incroyable. Si leur réputation a été ternie par l'affaire somalienne, aux yeux des Manitobains, les militaires ont certes rétabli leur réputation et ont brillé au cours de ces heures difficiles. Ils ont accompli un travail extraordinaire.


AFFAIRES COURANTES

Régie interne, budgets et administration

Dépôt du premier rapport

L'honorable Colin Kenny, président du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, dépose le premier rapport du comité, conformément à la Loi sur le Parlement du Canada.

Le discours du Trône

L'adresse en réponse-Fin du débat le huitième jour de séance-Avis de motion

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je donne avis que demain, le jeudi 2 octobre 1997, je proposerai:

Que les délibérations à l'ordre du jour pour la reprise du débat sur la motion tendant à l'adoption d'une Adresse en réponse au discours du Trône, prononcé par Son Excellence le Gouverneur général devant les deux Chambres du Parlement, se terminent le huitième jour de séance où l'ordre aura été débattu.

la Société de développement du Cap-Breton

Avis de motion tendant à constituer
de nouveau le comité spécial

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, je donne avis que mardi prochain, le 7 octobre 1997, je proposerai:

Que le comité spécial du Sénat sur la Société de développement du Cap-Breton soit reconstitué pour examiner, afin d'en faire rapport, le rapport annuel, le plan d'entreprise ainsi que les rapports d'activité de la Société de développement du Cap-Breton et d'autres questions connexes;

Que le comité ait le pouvoir de faire comparaître des personnes et produire des documents, d'entendre des témoins, de faire rapport de temps à autre et de faire imprimer au jour le jour documents et témoignages, selon les instructions du comité;

Que les documents et les témoignages recueillis à ce sujet et le rapport déposé au Greffier du Sénat le 25 avril 1997 par le comité spécial du Sénat sur la Société de développement du Cap-Breton au cours de la trente-cinquième législature soient renvoyés à ce comité;

Que le comité soit autorisé à permettre la diffusion de ses délibérations publiques par les médias d'information électroniques, de manière à déranger le moins possible les travaux; et

Que le comité présente son rapport final au plus tardle 15 décembre 1997, et que le comité conserve les pouvoirs nécessaires à la diffusion de son rapport final, et ce jusqu'au 30 décembre 1997.

La Sécurité et les services de renseignement

Avis de motion portant création d'un comité spécial

L'honorable William M. Kelly: Honorables sénateurs, je donne avis que jeudi prochain, le 2 octobre 1997, je proposerai:

Qu'un comité spécial du Sénat soit créé pour entendre des témoignages et étudier certaines questions concernant les opérations de renseignement de sécurité du gouvernement du Canada;

Que le comité examine dans quelle mesure les recommandations du rapport du comité spécial sur le terrorisme et la sécurité publique (juin 1987) et le rapport du comité spécial sur le terrorisme et la sécurité publique (juin 1989) ont été mises en oeuvre par le gouvernement du Canada, et fasse rapport à ce sujet;

Que le comité examine la valeur de l'examen ou du contrôle exercé par le gouvernement du Canada sur l'appareil de sécurité et de renseignement, y compris sur chacune des structures des ministères qui effectuent des opérations de sécurité et de renseignement ou qui en ont le mandat, et présente des recommandations à ce sujet;

Que le comité examine la coordination intragouvernementale et intergouvernementale liée au mandat du gouvernement du Canada en matière de renseignement et de sécurité, et présente des recommandations à ce sujet;

Que le comité examine le mandat général et la capacité générale d'évaluer les menaces de l'appareil de sécurité et de renseignement du gouvernement du Canada et des divers éléments qui le composent, et présente des recommandations à ce sujet;

Que le comité soit composé de sept sénateurs, devant être désignés à une date ultérieure;

Que le comité ait le pouvoir de faire rapport de temps à autre, de convoquer des personnes, d'exiger la production de documents et pièces, et de faire imprimer au jour le jour les documents et témoignages qu'il juge à propos; et

Que le comité présente son rapport final au plus tardle 15 avril 1998.

L'achat des hélicoptères dans les Maritimes

Avis d'interpellation

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, je donne avis que jeudi prochain, le 7 octobre 1997, j'attirerai l'attention du Sénat sur la question relative à l'achat des hélicoptères dans les Maritimes.

PÉRIODE DES QUESTIONS

Le solliciteur général

L'application des lignes directrices et des politiques de la GRC aux corps de police intégrés-La position du gouvernement

L'honorable Brenda M. Robertson: Honorables sénateurs, j'ai une question à l'intention du leader du gouvernement au Sénat. Lors de la tentative du Nouveau-Brunswick pour dissoudre le corps de police de Moncton et imposer à la ville un corps de police régional relevant de la GRC, le premier ministre de la province a promis, en juillet dernier, que si les policiers de Moncton intégraient la GRC, ils ne seraient pas assujettis aux règles en matière de mutation en vigueur dans le corps policier fédéral.

Le leader du gouvernement au Sénat voudrait-il demander au solliciteur général si son ministère ou la GRC a donné au premier ministre du Nouveau-Brunswick l'assurance qu'il n'y aurait pas de mutation des policiers de Moncton, assurance qui serait contraire aux lignes directrices et aux politiques de la GRC telles qu'elles s'appliquent aux autres membres du corps policier fédéral?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, la réponse est très nette: oui. Je ne connais pas très bien la situation. Bien sûr, j'en ai pris connaissance dans les journaux, comme d'autres sénateurs. Je serai très heureux d'examiner la chose de plus près et de fournir au sénateur les renseignements voulus.

Le sénateur Robertson: Honorables sénateurs, j'ai une question complémentaire. Le leader du gouvernement voudrait-il aussi demander au solliciteur général comment, dans le cas où ce dernier, son prédécesseur, des fonctionnaires du ministère ou des représentants de la GRC auraient autorisé le premier ministre McKenna à donner une telle assurance, ces directives ne pourraient pas être discriminatoires à l'égard de tous les autres membres de la GRC et comment elles n'auraient pas un effet perturbateur au sein de la GRC?

Le sénateur Graham: Je me ferai un plaisir d'obtenir l'opinion du solliciteur général à ce sujet également.

La justice

Le véritable coût de l'établissement du registre prévu par la Loi sur les armes à feu-La position du gouvernement

L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, ma question s'adresse elle aussi au leader du gouvernement au Sénat. Une note d'information récemment découverte en application de la Loi sur l'accès à l'information, révèle que le coût du nouveau registre des armes à feu dépassera les 85 millions de dollars prévus à l'origine. De combien exactement, on ne le sait pas encore. Selon cette même note d'information, la mise en oeuvre de ce registre doit être retardée.

À combien va s'élever la responsabilité financière des contribuables canadiens à l'égard de ce nouveau registre? Combien vont-ils devoir payer? Le gouvernement a-t-il l'intention d'augmenter les frais d'enregistrement en conséquence? Est-ce que le leader, ou quelqu'un dans son entourage, sait quand ce registre deviendra obligatoire?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, en réponse à la dernière partie de la question, je vais essayer de déterminer quand le registre entrera en vigueur.

Le gouvernement a-t-il l'intention d'augmenter les frais d'enregistrement? Pas que je sache. Le sénateur a posé une question très détaillée sur le coût du registre, ou plutôt sur ce qu'on pense qu'il coûtera, et je vais donc devoir me renseigner à ce sujet.

L'incidence du procès intenté par les provinces concernant la mise en oeuvre de la Loi sur les armes à feu-La position du gouvernement

L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, j'ai une question complémentaire sur ce même sujet. Est-ce que le procès intenté par l'Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba, l'Ontario et, je pense, les Territoires du Nord-Ouest et le Yukon a une incidence sur la capacité ou sur la volonté du gouvernement d'aller de l'avant dans l'immédiat? Ce serait bien de connaître la réponse à cette question car cette loi touche beaucoup de gens et de commerces. Le leader a-t-il une réponse à ma question, s'il vous plaît?

(1430)

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement: À ma connaissance, cela ne gêne en rien la capacité du gouvernement d'aller de l'avant au sujet de l'enregistrement. Je suis naturellement au courant du procès intenté par l'Alberta, la Saskatchewan, l'Ontario, les Territoires du Nord-Ouest et le Yukon que mentionnait l'honorable sénateur. Je demanderai les renseignements qu'il recherche.

La défense nationale

Le trou dans le budget des Forces armées-La position du gouvernement

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, je souhaite la bienvenue au leader du gouvernement dans ses nouvelles responsabilités et je vais, de suite, lui poser une question.

J'ai appris que les Forces armées canadiennes, si importantes pour les opérations de maintien de la paix partout dans le monde, avaient un trou de 150 millions dans leur budget. Est-ce que le leader pourrait confirmer ce montant, ou du moins confirmer que c'est un montant important?

On me dit que ce trou dans le budget est à l'origine d'un plan visant à réduire sérieusement les effectifs des Forces armées canadiennes. On parle de l'abolition de 3 000 postes et peut-être davantage. Les Forces armées canadiennes sont en train d'être démembrées sous nos yeux et à notre insu. Il y aurait l'élimination des trois bataillons légers récemment constitués, soit 1 500 personnes; l'élimination d'une compagnie dans chacun des six bataillons d'infanterie restants, 600 personnes; l'élimination d'une batterie dans chacun des trois régiments d'artillerie, 300 personnes; l'élimination d'un escadron dans chacun des trois régiments blindés, 300 personnes; et l'élimination du 8e Hussard canadien, 300 personnes.

Est-ce que le distingué leader du gouvernement au Sénat pourrait nous donner une idée du niveau des réductions? Est-ce en effet 150 millions? Pourrait-il confirmer que c'est de cette façon que le gouvernement veut trouver les 150 millions?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je suis tout à fait d'accord avec la déclaration au sujet de la contribution de nos troupes au maintien de la paix dans le monde. D'ailleurs, j'en ai fait l'expérience, ayant observé les élections à plusieurs endroits où étaient les troupes canadiennes, en Namibie, à la frontière de l'Angola et ailleurs. Je pense que les sénateurs partagent tous la fierté et l'admiration que suscitent ces excellents ambassadeurs du Canada dans de nombreuses parties du monde.

Le sénateur Forrestall a parlé de réduction et de trou dans le budget. D'abord, il a dit qu'il y avait un trou de 150 millions de dollars dans le budget, puis il a parlé de réductions de150 millions de dollars.

Le sénateur Forrestall: Le trou dans le budget correspond à la somme d'argent. La réduction servira à régler le problème créé par cette somme de 150 millions de dollars qui manque.

Le sénateur Graham: L'honorable sénateur veut sans doute parler des effectifs des forces armées et, lorsqu'il a fait référence au trou de 150 millions de dollars, il parlait vraiment du budget.

Le sénateur Forrestall: Lorsque le leader pourra lire ma question sur papier, il comprendra quelles informations je cherche à obtenir.

Le sénateur Graham: Je m'empresserai de trouver ces informations pour le sénateur dès que je le pourrai.

Les pêches et les océans

La non-exécution du plan Mifflin-La disponibilité des fonds de recyclage promis aux pêcheurs de la Colombie-Britannique-La position du gouvernement

L'honorable Pat Carney: Honorables sénateurs, je voudrais, à mon tour, initier le nouveau leader du gouvernement au Sénat aux joies des questions provenant de ce côté de la Chambre.

J'ai posé cette question en mars dernier, mais je n'ai reçu aucune réponse. Il y a près d'un an, le ministre des Pêches d'alors, Fred Mifflin, a promis qu'il ferait «tout ce qu'il faudrait» pour fournir les fonds nécessaires à la formation des pêcheurs de la Colombie-Britannique et des travailleurs à terre déplacés par le plan du gouvernement concernant les pêches. Le plan que le ministre proposait à cette époque aurait déplacé la moitié de la flotte.

Près d'un an plus tard, l'argent n'est pas encore arrivé et vendredi dernier, certains centres de formation ont fermé leurs portes faute de fonds. Le centre de South Island Streams, qui assurait la formation des pêcheurs, a dû annuler la plupart de ses programmes. Il ne reste que huit pêcheurs sur 200 qui profitent encore de la formation.

Quand est-ce que les quelque 500 millions de dollars requis pour la formation des pêcheurs déplacés seront mis à la disposition des bénéficiaires et quand exactement le leader du gouvernement au Sénat me donnera-t-il une réponse?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): J'essaierai d'obtenir cette réponse le plus tôt possible. La question est très précise et j'essaierai d'obtenir la réponse pour demain ou du moins pour la semaine prochaine.

Le sénateur Carney: Je ne comprends pas. J'ai posé une question précise, je m'attends naturellement à recevoir une réponse précise.

Le sénateur Graham: La question précise était de savoir quand je pourrai vous donner une réponse, et j'ai dit: aussitôt que possible; peut-être demain ou, à défaut, d'ici la semaine prochaine.

At Work in Rural Communities

Le coût et le but du document-La position du gouvernement

L'honorable Leonard J. Gustafson: Honorables sénateurs, j'ai une question à poser au leader du gouvernement au Sénat. Il est arrivé sur son bureau un document très volumineux intituléAt Work in Rural Communities.

J'habite dans une collectivité rurale et je vois que le gouvernement n'y fait pas grand-chose, sauf priver les gens de leurs biens.

Le coût de ce document me préoccupe. Qui a obtenu le contrat pour le produire et quel est son but? A-t-il été largement diffusé?

Ce genre de chose ne donne pas une bonne image aux ministériels.

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Avant de donner ma réponse, je voudrais savoir comment diable le sénateur a pu apporter ce document ici.

Le sénateur Gustafson: Je suis assez fort.

Le sénateur Graham: Le chef de l'opposition a terminé ses observations de bienvenue au sénateur Peggy Butts en disant: «Dieu soit loué et passez les munitions». Ce document fait peut-être partie des munitions.

Quoi qu'il en soit, je m'empresserai d'obtenir une réponse dans les meilleurs délais.

L'assurance-emploi

Le refus du ministre des Finances de réduire  les cotisations-La position du gouvernement

L'honorable Michael A. Meighen: Honorables sénateurs, moi aussi je suis heureux de féliciter le leader du gouvernement au Sénat pour ses nouvelles fonctions. Voyant qu'il aime répondre aux questions venant de ce côté-ci, je vais prolonger son bonheur juste un peu plus.

Ma question a trait aux cotisations à l'assurance-emploi. Étant donné que, selon les meilleures estimations, le compte affichera un surplus de 16 milliards de dollars pour l'exercice en cours, le leader du gouvernement pourrait-il nous expliquer pourquoi le ministre des Finances refuse d'envisager une réduction du taux de cotisation, qui pourrait notamment passer de 2,80 $ à environ 2,20 $ par 100 $ de rémunération assurable, comme l'ont recommandé la Chambre de Commerce du Canada ainsi que d'autres prévisionnistes et commentateurs?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): L'honorable sénateur Meighen a mentionné le taux de 2,20 $ préconisé par certains groupements d'entreprises et évoqué par la Chambre de commerce du Canada. Je crois cependant comprendre qu'une réduction de cet ordre équivaudrait à renoncer à des recettes d'environ 4,2 milliards de dollars en 1998.

Le taux de cotisation à l'assurance-emploi, honorables sénateurs, devait passer à 3,30 $ lorsque le gouvernement actuel est arrivé au pouvoir, mais il a réussi à le maintenir à 2,90 $ pour cette année. Sauf erreur, le taux de cotisation a été réduitde 5 cents l'année dernière, et le gouvernement s'est engagé à le réduire encore de 10 cents en 1998. Il faut se rappeler que chaque réduction de 10 cents du taux de cotisation à l'assurance-emploi coûte 700 millions de dollars à l'État.

(1440)

Selon l'honorable sénateur, d'ici la fin de l'exercice, l'excédent sera de l'ordre de 16 milliards de dollars. J'ignore si ce chiffre est exact, mais c'est celui que prévoit l'honorable sénateur. Pour ma part, je ne sais pas à combien s'élève l'excédent à l'heure actuelle.

Voici un extrait de l'article 66 de la Loi sur l'assurance-emploi adoptée en juin 1996:

Pour chaque année, la Commission fixe, avec l'agrément du gouverneur en conseil, sur la recommandation du ministre et du ministre des Finances, le taux de cotisation qui, à son avis, permet le mieux [...]

Honorables sénateurs, voici le passage essentiel:

 

[...] au cours d'un cycle économique, d'assurer un apport de revenus suffisant pour couvrir les débits autorisés sur le Compte d'assurance-emploi [...]
Si ma mémoire est bonne, le ministre des Finances a demandé à l'actuaire en chef quel montant d'excédent permettrait d'assurer que nous ne soyons pas en situation déficitaire, si jamais il y avait une récession. Sauf erreur, l'actuaire en chef a répondu que ce montant est de l'ordre de 15 milliards de dollars. Nous voulons certes agir de façon responsable à cet égard.

Le sénateur Meighen: Honorables sénateurs, on pense ici à la remarque de C.D. Howe: «Qu'est-ce qu'un milliard?» Dire qu'il convient de se réjouir que la cotisation ne soit pas passéede 2,80 à 3,20 $, c'est un peu comme dire que le leader du gouvernement devrait être ravi à la pensée que je vais lui donner trois coups sur la tête au lieu de dix.

À mon avis, les cotisations d'assurance-emploi ne devraient pas être une arme importante pour lutter contre le déficit ou la dette. Nous devrions éviter de trouver l'argent à cette fin en allant chercher une si grande somme au moyen de cette taxe fatale aux emplois.

Le leader du gouvernement au Sénat s'engagera-t-il à déposer l'information produite par l'actuaire en chef selon laquelle il serait prudent d'accumuler un excédent de 15 milliards de dollars, ce qui, si je ne m'abuse, se traduirait par un taux de chômage prévu de 10 à 15 p. 100? Le gouvernement sait peut-être quelque chose que le reste du monde ignore.

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je me ferai un plaisir de chercher à obtenir cette information et de la déposer.

À propos de la réduction de 40 cents, je dois ajouter que le seul fait de réduire les cotisations de 3,30 $ à 2,90 $ pour 1997 représente une baisse des cotisations de l'ordre de1,7 milliard de dollars. Je le répète, nous avons déjà annoncé une autre réduction des cotisations de 10 cents pour 1998.

Si le sénateur propose que nous appliquions une telle réduction, au risque même de voir grimper le déficit, je lui rappellerai et je rappellerai aux gens qui pensent comme lui qu'ils ont déjà fait de la réduction du déficit une condition pour la création d'emplois et la croissance économique.

Il vaut la peine de signaler que, à l'heure actuelle, le Canada est, parmi les principaux pays industrialisés, celui dont le taux des charges sociales est le plus bas.

[Français]

Le Parti libéral du Canada

Les méthodes de financement du Parti-L'enquête de la Gendarmerie royale du Canada

L'honorable Pierre Claude Nolin: Honorables sénateurs, je désire féliciter le ministre de sa nomination.

Une information assez troublante vient de faire surface à l'autre Chambre selon laquelle une enquête de la Gendarmerie royale du Canada est présentement en cours sur les méthodes de financement duParti libéral du Canada. Pourriez-vous informer cette Chambre des développements de cette enquête?

[Traduction]

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je regrette, mais je n'ai aucune information à donner au sénateur à ce sujet. C'est la première fois que j'entends parler de cette enquête, et il en est de même pour beaucoup d'autres sénateurs.

Le sénateur Nolin: Le leader du gouvernement peut-il assurer aux sénateurs que le gouvernement ne se mêlera pas de cette enquête?

Le sénateur hoche la tête. Pourrions-nous avons une réponse verbale, s'il vous plaît?

Le sénateur Graham: C'est une question hypothétique. Le sénateur sait fort bien que le gouvernement ne s'en mêlera pas.


Bibliothèque du Parlement
Langues officielles
Examen de la réglementation

Les comités mixtes permanents-Message des Communes

Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes le message suivant:

Il est ordonné - Que les comités mixtes permanents de la Chambre soient composés des députés dont les noms figurent ci-après:

 

Bibliothèque du Parlement

Membres: Catterall, Cloutier, Finlay, Grey (Edmonton-Nord), Hilstrom, Karygiannis, Lavigne, Lill, Malhi, Mayfield, Mercier, Plamondon, Price, Redman, Saada, St. Denis-(16)
Membres associés: Davies, Dumas

Langues officielles

Membres: Assadourian, Bellemare, Bradshaw, Breitkreuz (Yellowhead), Coderre, Finestone, Godfrey, Godin, Jaffer, Kilger, McWhinney, Meredith, Paradis, Plamondon, St-Jacques, Tremblay, (Rimouski-Métis)-(16)
Membres associés: Brien, Nystrom, Vautour

Examen de la réglementation

Membres: Bryden, Casey, DeVillers, Epp, Jenning, Lee, Lunn, Maloney, Marceau, Mark, McKay (Scarborough Est), Murray, Nystrom, Shepherd, St-Hilaire, Wappel, White (NorthVancouver)-(17)
Membres associés: Axworthy (Saskatoon-Rosetown-Biggar), Bellehumeur, Guimond
Qu'un message soit transmis au Sénat afin d'informer les honorables sénateurs des noms des députés qui représenteront la Chambre aux comités mixtes permanents.

ATTESTÉ

Le Greffier de la Chambre des communes,
ROBERT MARLEAU


ORDRE DU JOUR

Le discours du Trône

La motion d'adoption de l'Adresse en réponse-Ajournement du débat

Le Sénat passe à l'étude du discours que Son Excellence le Gouverneur général a prononcé à l'ouverture de la première session de la trente-sixième législature.

L'honorable Jean B. Forest, appuyée par l'honorable sénateur Mercier, propose:

Que l'adresse dont le texte suit soit présentée àSon Excellence le Gouverneur général du Canada:

À Son Excellence le très honorable Roméo LeBlanc, membre du Conseil privé de la Reine pour le Canada, Chancelier et Compagnon principal de l'Ordre du Canada, Chancelier et Commandeur de l'Ordre du Mérite militaire, Gouverneur général et Commandant en chef du Canada.

QU'IL PLAISE À VOTRE EXCELLENCE:

Nous, sujets très dévoués et fidèles de Sa Majesté, le Sénat du Canada, assemblés en Parlement, prions respectueusement Votre Excellence d'agréer nos humbles remerciements pour le gracieux discours qu'il a adressé aux deux Chambres du Parlement.

-Honorables sénateurs, dans son discours au Parlement de mardi dernier, Son Excellence le Gouverneur général a parlé des besoins et des préoccupations des Canadiens, il a souligné les valeurs qu'ils s'efforcent de respecter et il a fait état des espoirs, des rêves et des aspirations qui leur sont chers. Il a ensuite expliqué les mesures que le gouvernement prendra pour répondre à ces besoins, pour apaiser leurs préoccupations et pour les aider à concrétiser ces espoirs, ces rêves et ces aspirations.

Pendant le dernier mandat, il a fallu gérer notre budget avec austérité à cause de la précarité de notre situation économique et financière. Cela a occasionné bien des bouleversements pour les entreprises et les syndicats ainsi que pour les établissements et les individus. Le gouvernement lui-même n'a pas été épargné. Tout le monde a dû se serrer la ceinture. Rares sont ceux qui ont survécu sans faire de sacrifices.

Comme Son Excellence l'a toutefois mentionné, le travail acharné et les nombreux sacrifices de l'ensemble des Canadiens portent maintenant fruit. Le déficit est en train de baisser et il est presque éliminé. Dans l'ensemble, l'économie se porte bien. Le taux d'inflation demeure bas, à l'instar des taux d'intérêt. Bien qu'il soit figé à un niveau élevé inacceptable dans certaines parties de notre pays, le taux de chômage montre une tendance à la baisse encourageante dans de nombreuses régions du Canada.

(1450)

Comme Son Excellence l'a fait remarquer, le gouvernement doit certes «continuer d'être responsable et vigilant de manière à ce que les finances du pays soient maintenues en bon état», mais il «a recouvré la capacité de répondre aux priorités des Canadiens tout en vivant selon ses moyens». Comme le ministre des Finances l'a si bien dit:

Un gouvernement débarrassé du déficit n'est pas un gouvernement pouvant se soustraire à ses obligations. C'est un gouvernement capable d'exercer ses obligations.

Pendant qu'ils faisaient du porte-à-porte dans leur circonscription durant la campagne électorale de l'été dernier, les candidats ont appris quelles étaient les préoccupations de leurs électeurs et que ces dernières avaient, dans bien des cas, pour dénominateur commun une profonde et troublante anxiété quant à la menace pesant sur l'unité de leur pays. Les candidats ont appris que nombre de Canadiens voulaient que leur gouvernement joue un rôle de premier plan dans le débat sur l'avenir de leur pays.

Les candidats ont en outre appris de première main ce que les Canadiens voulaient que le gouvernement fasse pour répondre à leurs préoccupations. Ils souhaitaient que le gouvernement stimule l'économie, crée des emplois, notamment pour les jeunes, prenne des mesures pour lutter contre la pauvreté chez les enfants et les personnes âgées, augmente l'investissement dans la santé et l'éducation et prenne des mesures pour rendre nos collectivités plus sûres.

Cependant, les Canadiens ont dit clairement qu'ils voulaient que ces mesures soient prises sans porter atteinte à la stabilité financière si chèrement acquise dernièrement. Ils voulaient que le gouvernement adopte une démarche équilibre en ciblant avec soin ses dépenses dans les domaines les plus prioritaires.

La réponse à toutes les propositions de la base se trouve dans le discours du Trône, où Son Excellence le Gouverneur général dit:

Le gouvernement est résolu à suivre cette approche équilibrée d'investissement social et de gestion financière prudente, au moment où il conduit le pays vers une santé économique renouvelée et durable, et une meilleure cohésion sociale.

Son Excellence a ensuite énoncé les priorités du gouvernement - bâtir un Canada plus fort, investir dans les enfants, investir dans le domaine de la santé et des soins de qualité, rendre nos collectivités plus sûres, offrir des possibilités aux jeunes Canadiens, investir dans le savoir et la créativité, accroître les possibilités offertes aux communautés autochtones, se tourner vers l'avenir, célébrer le nouveau millénaire et suivre la voie vers le XXIe siècle.

Je voudrais parler un peu de quelques-unes de ces priorités. La première priorité de ma liste, c'est bâtir un Canada plus fort. Je dis cela parce que c'est la principale raison qui m'a convaincue d'accepter une nomination au Sénat au moment où mon mari Roc et moi planifions notre retraite. J'espère que je réussirai à contribuer, même très modestement, à bâtir un Canada plus fort.

C'est là un projet auquel j'ai oeuvré toute ma vie. Mon amour du Canada m'a été instillé très jeune par ma mère, qui est née en Angleterre, et mon père, qui a combattu dans les tranchées de France au cours de la Première Guerre mondiale, qui a été blessé sur la crête de Vimy et a passé plusieurs mois en Angleterre en attendant la fin de la guerre et le rapatriement au Canada sur un navire-hôpital. Lorsque j'étais enfant, je l'ai souvent entendu raconter que pendant ces longs mois de solitude en Angleterre, il se disait que, s'il revenait un jour au Canada vivant, il ne retournerait jamais outre-mer. Il n'y est jamais retourné. Il est rentré dans les Prairies, d'où il était parti, et il y est mort.

Mon mari, un Franco-Manitobain, a aussi grandi dans un foyer qui cultivait l'amour du Canada, qui chérissait et entretenait la langue et la culture françaises et qui pratiquait avec ferveur la religion catholique. Avec ce bagage, quatre fils sont allés servir leur pays pendant la Seconde Guerre mondiale, ce qui démontre bien que l'amour du pays va bien au-delà du nationalisme étroit qui a causé tant de douleur dans le monde. Cet amour est plutôt tourné vers le reste du monde, prêt à servir en cas de besoin.

Roc et moi avons depuis eu le bonheur de voyager dans beaucoup de régions du Canada, de Tuktoyaktuk, dans l'Arctique, jusqu'aux régions les plus méridionales de notre pays, de la côte ouest de l'île de Vancouver jusqu'à la côte est de Terre-Neuve. Nous nous sommes émerveillés des beautés du Canada et de ses vastes étendues, mais le Canada est beaucoup plus qu'un territoire. Plus que tout, nous avons apprécié la population canadienne, la richesse que lui donne sa diversité, sa vivacité, ses talents et ses dons, bref, tout ce qui contribue à la magnifique mosaïque canadienne.

Ayant vu ce qu'était le Canada et ce que c'était d'être Canadien, Roc et moi avons voulu faire partager notre expérience à nos enfants. C'est ainsi qu'il y a 30 ans, nous avons décidé de leur faire faire le tour du Canada, notamment de leur faire visiter la région de la capitale, et de les emmener à l'Expo et à Gaspé, d'où le père de Roc était originaire. Afin de transporter et loger toute cette grande petite famille, Roc a acheté un autobus scolaire qu'il a converti en prototype de l'autocaravane moderne. C'était un truc ingénieux qui pouvait loger notre grande famille - sept enfants et nous-mêmes. Il l'a baptisée «Voyageur II», et c'est en joyeux campeurs que nous avons quitté Edmonton pour l'Est.

Après nous être arrêtés à plusieurs endroits dans les Prairies, nous avons visité le nord de l'Ontario et certaines parties du Québec, où la seule langue parlée était le français et où nos enfants ont appris l'importance d'avoir fréquenté des écoles françaises, que je souhaiterais moi-même avoir fréquentées.

Ici, dans la Région de la capitale nationale, nous leur avons fait visiter les immeubles du Parlement, la Cour suprême, la Monnaie royale et d'autres sites historiques intéressants. À l'Exposition, ils ont eu un aperçu des différents peuples du monde entier et ont vu ce que le Canada avait de mieux à offrir. La ville historique de Québec a éveillé leur intérêt pour l'histoire du Canada et la culture française dans laquelle leur père a grandi. Avec un peu de recul, nous nous rendons compte que nous avons vu le Canada sous son meilleur angle, à l'un des plus beaux moments de son histoire.

Je me permets de raconter ces anecdotes personnelles parce qu'elles traduisent, je crois, l'expérience qu'ont connue de nombreux autres Canadiens. Si un plus grand nombre de jeunes Canadiens avaient l'occasion de rencontrer d'autres jeunes Canadiens dans leur propre milieu - sur leur terrain pour ainsi dire - ils apprendraient à mieux connaître et à mieux apprécier leur pays. Des programmes comme Katimavik et les divers programmes d'échanges d'étudiants ont grandement contribué à renforcer chez les jeunes leur sentiment d'appartenance au Canada.

Ici aussi, nos expériences familiales nous ont appris que les jeunes de différentes régions et de différents milieux qui participent à un programme d'échanges et vont vivre dans les familles d'autres jeunes apprennent beaucoup les uns des autres. Quelques semaines après avoir quitté sa famille pour aller vivre dans une famille canadienne-française de la région de Chicoutimi, notre petit-fils a appelé sa mère. Il jubilait et était ravi de lui dire qu'il était convaincu que les choses allaient bon train, puisqu'il commençait à rêver en français.

Compte tenu de ces expériences, j'étais très heureuse d'entendre l'annonce, dans le discours du Trône, que le gouvernement prévoyait de fournir davantage de fonds pour les programmes d'échanges, ce qui contribuera sans doute à faire disparaître les différences entre les Canadiens de toutes les régions du pays.

Dans le processus continu d'édification d'un Canada plus fort, les premiers ministres provinciaux ont récemment lancé un débat encourageant à leur conférence de Calgary. Comme le premier ministre l'a dit dans son discours en réponse au discours du Trône:

Je salue l'initiative prise à Calgary par les premiers ministres provinciaux et les leaders des territoires. Il s'agit d'une affirmation constructive et positive des valeurs importantes qui décrivent ce qu'est le Canada et ce qui nous rend Canadiens.

Leur désir de faire participer la population au débat sur l'unité canadienne est aussi une initiative que nous devons saluer. Le fait que les chefs des partis conservateur, néo-démocrate et réformiste ont tous appuyé ces initiatives nous permet d'espérer que les choses continueront de progresser et que cette démarche finira par donner un résultat positif.

Pour bâtir un Canada plus fort, il faut commencer par bâtir des familles plus fortes et en meilleure santé. Bien que les parents soient indéniablement les principaux responsables du soin et de l'éducation de leurs enfants, toutes les familles ont besoin de l'aide de la collectivité. Certaines familles, qui ont des malades parmi leurs membres ou encore qui ont de la difficulté à joindre les deux bouts à cause de leur revenu trop faible, ont besoin de plus d'aide que d'autres. Il est bon que le gouvernement soit prêt à investir dans ces enfants. Les centres d'excellence, le programme Bon départ qui s'appliquera désormais dans les réserves, les montants supplémentaires affectés à la prestation fiscale pour enfants et bien d'autres initiatives ne se veulent pas une façon de faire la charité aux familles pauvres, mais plutôt un coup de pouce qui permettra à leurs enfants de profiter pleinement des possibilités d'accès à l'éducation auxquels ils ont droit en leur qualité de citoyens canadiens. En aidant ceux-ci à réaliser leur potentiel, le Canada se rapproche davantage des familles dans le besoin.

(1500)

Dans le discours du Trône, le gouvernement, au moyen de la Stratégie emploi jeunesse, s'engage à offrir de meilleures possibilités aux jeunes Canadiens, à les aider à faire cette importante transition entre l'école et le marché du travail. C'est une bonne nouvelle pour ceux et celles qui, tout en étant considérés comme instruits d'après les critères d'hier, ne possèdent pas les connaissances ou les compétences nécessaires pour amorcer un bon départ sur le marché du travail d'aujourd'hui. Pour ce faire, il faudra regrouper les ressources du gouvernement, du monde des affaires, des syndicats et des établissements d'enseignement postsecondaire.

Des organisations comme The Learning Link, qui favorise la collaboration et la concertation au sein de ces groupes, les programmes d'apprentissage pour les personnes de métier et les programmes coopératifs pour les étudiants d'université sont tous de bons exemples de ce que peuvent donner une planification et une collaboration inventives. Des notions comme «la formation en milieu de travail» et «l'éducation permanente» doivent devenir des synonymes et des balises de l'éducation moderne pour que les gens réussissent dans la société du savoir dans laquelle nous vivons et apprenons.

En tant que membre du sous-comité du sénateur Bonnell sur l'enseignement postsecondaire, j'ai eu l'honneur, l'an dernier, de participer à des audiences publiques qui se sont tenues d'un océan à l'autre pour entendre les étudiants, les universitaires et les administrateurs d'établissements postsecondaires. Nous avons appris quelles étaient les préoccupations des étudiants, qui allaient de problèmes d'accès et de mobilité à des dettes croissantes et des besoins d'argent. Les universités, quant à elles, ont dit manquer d'argent pour payer les professeurs additionnels qu'exige un nombre croissant d'étudiants et ont parlé d'infrastructures vieillissantes incapables de soutenir la recherche qui est pourtant tellement critique dans une société du savoir.

Nous étions à Halifax le soir où le budget a été déposé et nous avons été heureux d'être informés sur un certain nombre d'initiatives que le gouvernement prévoyait prendre pour aider les étudiants, les facultés et les administrateurs dans les domaines le préoccupant le plus.

Le gouvernement sait qu'un bon enseignement est indispensable à la transmission des premières connaissances et que la recherche l'est tout autant à l'acquisition de nouvelles connaissances. Il s'est donc engagé lui-même dans le budget à injecter des fonds pour établir et maintenir la Fondation canadienne pour l'innovation. Le financement se fera dans le cadre d'un partenariat avec les provinces, le secteur privé et les universités. Cette aide financière stimulera le genre de recherche qui nous fera entrer dans le XXIe siècle.

La semaine dernière, à titre de chancelier émérite de l'Université de l'Alberta, j'ai assisté à l'installation de Martha Piper, qui avait été vice-présidente de la recherche à l'Université de l'Alberta, à titre de nouvelle présidente de l'Université de la Colombie-Britannique. Lors de cette cérémonie, j'ai rencontré des présidents et des chanceliers d'université de tout le Canada qui ont appuyé à l'unanimité la création de la Fondation canadienne pour l'innovation et les autres mesures prises par le gouvernement pour soutenir l'éducation postsecondaire. Le programme de bourses annoncé dans le discours du Trône de la semaine dernière, en l'honneur du prochain changement de millénaire, a été bien accueilli par tous. Certains ont toutefois laissé entendre que nous ferions mieux d'aider dès maintenant les étudiants qui ont besoin d'aide.

On pourrait dire que, pour que le Canada soit à la fine pointe de la société de demain, concurrentielle et axée sur la connaissance, nous devons aider nos étudiants dès aujourd'hui. Nous devons créer pour eux de grandes institutions du savoir où, comme on dit, ils pourront apprendre de la sagesse des morts et des interrogations des vivants.

Comme c'est dans l'enseignement que j'ai acquis mes cheveux blancs, vous comprendrez pourquoi je pense que, en aidant nos jeunes à acquérir une bonne formation, le gouvernement leur donne un passeport qui leur permettra de franchir le pas du XXIe siècle avec assurance.

Honorables sénateurs, nous, de notre génération, pourrions suivre l'exemple du vieil homme du poème deWill Allen Dromgoole intitulé Le constructeur de pont. Je me permets de vous le lire pour conclure mon intervention:

Un vieil homme, cheminant le long d'une route,
Arriva au soir d'une journée grise et froide
Au bord d'un gouffre large et profond
Au fond duquel coulait un noir courant.
Le vieil homme le traversa au crépuscule -
Les eaux sombres ne lui inspirant aucune crainte;
Une fois parvenu de l'autre côté, il se retourna
Et construisit un pont pour franchir le fossé.
«Vieil homme», lui dit un autre voyageur près de lui,
«Vous gaspillez vos forces en construisant ici.
Votre voyage se termine à la fin de la journée.
Vous n'aurez plus jamais à passer par ici.
Vous avez traversé le gouffre large et profond,
Pourquoi construisez-vous un pont à la tombée du jour?»
Le vieux constructeur leva sa tête grise.
«Cher ami, sur la route que j'ai suivie», dit-il,
J'ai vu aujourd'hui qui me suivait
Un jeune homme dont les pas l'amèneront ici.
Ce gouffre qui ne me posait aucun problème
Pourrait lui paraître infranchissable.
Il doit, lui aussi, traverser au crépuscule;
Cher ami, c'est pour lui que je construis ce pont.»

Honorables sénateurs, on peut dire que depuis quelques années, nous avons aussi traversé un gouffre où se trouvait une noire marée. Dans le langage des marins, nous avons parfois eu l'impression de subir le supplice de la planche quand venait le temps de régler des questions aussi difficiles que l'unité nationale, la viabilité économique, la durabilité de l'environnement et le maintien de notre précieux filet de sécurité sociale. La route a été difficile, mais nous avons presque atteint le but et nous ne pouvons pas nous permettre de faux pas. Nous devons traverser l'abîme et, comme le vieil homme dans le poème de Dromgoole, construire un pont pour les jeunes qui nous suivront.

En cette fin de XXe siècle, où certains d'entre nous sont également en fin de carrière au Sénat, nous devons travailler ensemble pour construire ce pont. Comme dirait mon époux Roc, qui est un constructeur chevronné, nous devons nous assurer que les plans sont conçus de manière à supporter la charge, que nos estimations de coûts sont justes et que les piliers sont suffisamment profonds, les poutres assez solides, les outils appropriés et la main-d'oeuvre des plus qualifiées. Si nous respectons ces exigences, notre pont vers l'avenir sera achevé dans les limites budgétaires, dans les délais prescrits et avec un minimum de faiblesses.

Si nous y arrivons, ceux qui nous suivront pourront traverser en toute sécurité et confiance l'abîme qui sépare ce siècle du prochain et atteindre l'autre côté d'un pas ferme. Les Canadiens, dans leur diversité magnifique et colorée, ouvriront la voie vers le prochain siècle.

Honorables sénateurs, nous pouvons réussir si nous essayons.

(Sur la motion du sénateur Mercier, le débat est ajourné.)

(Le Sénat s'ajourne à 14 heures demain.)


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